Raymond Morel 3780 days ago
" Question 1. Quelles tendances pour les télécoms voyez-vous émerger au-delà du smartphone et des mutations qu’il induit ?
Le smartphone constitue une rupture majeure car c’est la première fois dans l’histoire de l’humanité qu’on accepte de porter sur soi et de façon continue, un objet très complexe, voire « intelligent » : un téléphone/ordinateur. Et ce, désormais à l’échelle planétaire. En effet, le corps de l’homme moderne a connu très peu d’appareils sur lui (les lunettes et la montre, les bijoux et les vêtements existaient depuis fort longtemps)....."
" Cet « homme augmenté » est contemporain d’une autre mutation qui concerne les organisations (alors que le smartphone concerne les individus). Toutes les institutions, publiques ou privées, sont de plus en plus structurées par leur système d’information. Le SI devient ..."
" Je veux insister sur la portée anthropologique du smartphone, car elle ouvre à une multitude d’innovations : avec les nanotechnologies, s’ajoutera l’intégration des technologies invisibles et puissantes sur soi. ..."
" Et le smartphone individuel, comme le système d’information organisationnel, ouvrent des possibles. Là est la meilleure définition du numérique, à savoir l’augmentation des possibles et leur matérialisation. Il convient d’éliminer toute idée ..."
"Question 2. En faisant un peu de prospective, comment imaginez-vous la société numérique et plus particulièrement les télécoms dans 50 ans ?
Pour penser le futur, je ne pars jamais de la technique. Je me réfère ici à Bertrand Gille dans son excellente Histoire des techniques et à son concept de « système technique » qui est autant technique que culturel. Ce n’est pas l’imprimerie qui fait la Renaissance, contrairement à la vulgate, mais bien l’inverse, comme l’a bien montré l’historienne américaine Elizabeth Eiseinstein. Ce n’est pas l’ordinateur qui a fait la Guerre froide, mais les affrontements géopolitiques entre blocs qui ont conduit à l’ordinateur et même à Internet....."
"Question 3. Ne croyez-vous pas que l’avenir des télécoms et du numérique est plus un débat sociologique et, en somme, de choix de société ?
Le surinvestissement de chacun sur les objets techniques soulève un grand défi philosophique et anthropologique : pourquoi faut-il toujours plus technologiser la société ? La technique est un pharmakon, poison et remède à la fois, des sociétés éclatées, des sociétés qui se délitent. Ces débats de société vont se développer dans la société,...."
Pierre Musso est Professeur en Sciences de l’information et de la communication à Télécom ParisTech et à l’Université de Rennes II. Il est titulaire de la chaire d’enseignement et de recherche « Modélisations des imaginaires, innovation et création », lancée en octobre 2010, portée par Télécom ParisTech et l’Université de Rennes II, avec Dassault Systèmes, Ubisoft, Orange et PSA.
Administrateur des postes et des télécoms, il a soutenu une thèse de doctorat d’État consacrée aux télécommunications, à la régulation des réseaux et à Saint-Simon. Il fut chercheur au Centre national d’études des télécommunications (CNET) et membre du premier Conseil d’Administration de France Télécom de 1991 à 1995. Il fut aussi directeur de la recherche à l’INA.