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Notes de lecture
Technologies

Frédéric Bardeau, Nicolas Danet, Anonymous : pirates informatiques ou altermondialistes numériques ?

Limoges, fyp Éd., coll. Présence/Monographie critique, 2011, 208 p.
Gilles Boenisch
p. 357-360
Référence(s) :

Frédéric Bardeau, Nicolas Danet, Anonymous : pirates informatiques ou altermondialistes numériques ?, Limoges, fyp Éd., coll. Présence/Monographie critique, 2011, 208 p.

Texte intégral

1Anonymous : pirates informatiques ou altermondialistes numériques ? est un ouvrage qui tente de retranscrire les problématiques du phénomène Anonymous à partir d’une analyse méthodique, détaillée et sans parti pris. Avec une approche à la fois transversale et largement documentée, Frédéric Bardeau et Nicolas Danet dressent un historique et un portrait assez juste de ce mouvement caractéristique de notre époque. Naturellement, ils s’interrogent sur les prémices et les filiations en partant de la cyberculture des années 60 jusqu’au phénomène hacker qui n’a cessé de s’accroître avec l’omniprésence des technologies numériques (pp. 11-33). De ces deux postures, subsiste l’intérêt viscéral pour la liberté de l’information, le partage, la décentralisation et la contestation face à l’autorité pour tenter de rendre le monde meilleur (p. 19). Ils n’oublient pas d’étayer leurs approches de nombreux faits documentés, ce que beaucoup d’ouvrages ou de textes de vulgarisation négligent, en se limitant qu’aux aspects spectaculaires et aux faits retentissants. Cela a pour effet de donner une consistance à l’analyse qui permet de clarifier la complexité d’un domaine où il n’existe pas de réelles constantes, mais plutôt des tendances qui s’enchevêtrent.

2Ils s’intéressent au « projet hacker » (pp. 16-23) à travers deux textes fondateurs : « Le Manifeste du Hacker » de 1986, puis la médiatique « Déclaration d’indépendance du cyberspace » de 1996. Deux écrits qui tentent de démythifier l’image négative des hackers entretenue par les médias. Les rapports entre les autorités, qui sont aussi acteurs de la régulation et de la médiation, et les hackers, assoiffés de libertés ont toujours été tendus. Il en ressort une incompréhension radicale comme en témoigne l’extrait du dernier paragraphe du manifeste hacker : « Nous explorons… et vous nous appelez des criminels. Nous recherchons la connaissance… et vous nous appelez des criminels. Nous existons sans couleur de peau, sans nationalité, sans dogme religieux… et vous nous appelez des criminels. Vous construisez des bombes atomiques, vous financez des guerres, vous tuez, trichez, vous nous mentez et essayez de nous faire croire que c’est pour notre bien, et c’est encore nous les criminels. Oui, je suis un criminel. Mon crime est celui de la curiosité. Mon crime est de juger les gens sur ce qu’ils disent et pensent, pas sur leur apparence. Mon crime est de vous surpasser, chose que vous ne me pardonnerez jamais. Je suis un hacker, et ceci est mon manifeste. Vous pouvez arrêter cet individu, mais vous ne pouvez pas tous nous arrêter. Après tout, nous sommes tous les mêmes » (pp. 17-18). La particularité des hackers est qu’ils explorent et expérimentent en créant, mettant le « faire » comme principe fondateur de l’éthique hacker. L’accès à la connaissance et aux ordinateurs est considéré comme un droit fondamental, comme « tout ce qui pourrait vous apprendre quelque chose sur la manière dont le monde fonctionne, doit être illimité et total. Dès qu’un obstacle apparaît, il faut s’atteler à le faire sauter » (p. 19). Cette connotation anarchiste englobe les principes de l’éthique hacker : l’accès libre aux ordinateurs, leur capacité intrinsèque à améliorer la société, la liberté de l’information, la méritocratie, la méfiance envers toute forme d’autorité, et créer de l’art et du beau avec un ordinateur.

3La « Déclaration de l’indépendance du cyberspace » revendique l’autonomie d’un espace qui a créé ses propres frontières et s’est ainsi émancipé de la tutelle du vieux continent. Comme l’écrivent Frédéric Bardeau et Nicolas Danet, ce texte se positionne comme un acte de rébellion politique qui réclame avec véhémence que les représentants de « l’ancien monde » abandonnent toute velléité de contrôle et de gouvernance du cyberespace, sur lequel ils n’ont aucune légitimité. Il en va de l’avenir de l’humanité : le cyberspace est d’ores et déjà une réalité, et internet le moyen d’établir de nouvelles bases sur lesquelles construire un monde différent et meilleur : « Je viens du Cyberespace, le nouveau domicile de l’esprit. Au nom du futur, je vous demande à vous du passé de nous laisser tranquilles. Vous n’êtes pas les bienvenus parmi nous. […] Je déclare l’espace social global que nous construisons naturellement indépendant des tyrannies que vous cherchez à nous imposer. […] Les gouvernements tiennent leur juste pouvoir du consentement de ceux qu’ils gouvernent. Vous n’avez ni sollicité ni reçu le nôtre. […] Le Cyberespace ne se situe pas dans vos frontières » (pp. 21-22). Indéniablement, ce texte est politique et coïncide avec l’arrivée de l’altermondialisme et de l’activisme qui donne rapidement naissance au « hacktivisme » (pp. 34-61). Désormais, les hackers utilisent leurs compétences à des fins politiques où les démarches s’inscrivent dans la logique de la cyberculture : faire circuler l’information et libérer la parole individuelle, proposer des sources alternatives et indépendantes. Les hackers « prônent dans leurs actions une nouvelle conception du monde qui va, comme pour les altermondialistes, à l’encontre du capitalisme » (p. 35). L’objectif est de mettre en route un processus social fondé sur l’internet et la production coopérative en réseau et sur un rapport alternatif au travail, à l’argent, au temps qui caractérise une éthique qui est par essence une critique de l’économie capitaliste. Ainsi l’« internet ne doit[-t-il] pas être régi par les mêmes règles que le monde offline, surtout en ce qui concerne la liberté d’expression » (p.37). Cela conduira à une multiplicité de moyens et d’actions appelant à « la désobéissance civile électronique », tout en développant de manière générale un système de « surveillance des surveillants » : la « sousveillance » (p. 46). En multipliant les initiatives, l’objectif est de susciter une prise de conscience auprès des citoyens, qui ont l’habitude d’accepter l’inacceptable sans s’en rendre compte. D’ailleurs, comme cela est magistralement démontré dans cette analyse, si les hacktivistes agissent sur le terrain de l’information et des médias, c’est parce que c’est là que se concentrent les moyens qui pourraient changer la société. Surtout, c’est parce que les citoyens ont de plus en plus de possibilités de vérifier l’information qu’on leur propose, mais également d’en produire eux-mêmes. Paradoxalement, ce nouvel espace de liberté semble aussi être celui d’un système de surveillance radical, comme en témoigne la multiplication de lois oppressives et d’accords secrets. Cela va de la censure au filtrage, de la monétisation à outrance, de la fin de l’illimité, au prolongement exponentiel des droits intellectuels, à la criminalisation généralisée des actes pour finalement assimiler tout le monde, aussi bien hackers, hacktivistes, contestataires et simples internautes à des menaces en puissance, des « déviants », des « terroristes », des « voleurs », des « psychopathes », ou encore des « sauvages à civiliser ».

4En 2011, la réponse des hackers est radicale, si le réseau ne peut devenir synonyme de liberté, il faut en créer un autre : « L’indépendance du cyberespace, telle que formulée en 1996, appartient au passé. Nous avons besoin de réclamer d’urgence une indépendance, pour assurer la libre circulation de l’information. […] J’appelle à abandonner l’infrastructure existante pour créer la nôtre » (p. 58). Parce que les politiques de censure et de contrôle se ressemblent dans tous les pays, les différents projets sont déjà au stade de déploiement dans le monde entier. Ils reposent tous sur le maillage fin de relais WiFi totalement indépendants. Pour la première fois, la structure technique est affranchie de toute forme de centralisation, affranchie des fournisseurs d’accès, et appartient aux hackers. Mais la particularité du hacktivisme n’est pas exclusivement technique, mais aussi médiatique, car elle permet la formation d’un « espace public oppositionnel » (p. 60) où ceux qui veulent participer le peuvent, et où le résultat de leur action sera visible par tous.

5Anonymous est donc en filiation directe avec cette tendance et tient sa popularité du fait que le mouvement a concentré ses forces sur l’église de scientologie, la pédophilie et, récemment, contre toute forme de censure et d’autorité en épaulant Wikileaks et les révolutions arabes. L’internet a une mémoire et ses utilisateurs n’aiment pas qu’on les oblige à oublier. Et plus la censure est forte, plus l’attention du sujet et sa diffusion seront importantes, jusqu’à finalement sortir pour prendre la rue : « Plus vous censurez vos propres citoyens, plus ils doivent en savoir sur vous et sur ce que vous faites. Le temps de la vérité est venu. Le temps pour les gens de s’exprimer librement et d’être entendus partout dans le monde » (p. 149). Une manière de renouer aux fondements de la contestation.

6Essentiellement constituée en ligne via de multiples fils de discussion et de forums, l’organisation tient son nom du profil par défaut attribué aux internautes « anonymous » qui peuvent dialoguer et poster n’importe quel commentaire librement sans s’identifier. Un nom qui s’enracine par la volonté initiale de conserver l’anonymat face à des structures, telles la scientologie ou les agences de sécurité, qui tentent méticuleusement d’identifier les individus un à un. La force d’Anonymous est de réussir à se coordonner dans le monde entier, sans connaître l’identité des personnes avec qui l’on s’organise. Les Anonymous arrivent ainsi masqués à la première manifestation le 10 février 2008. « Ils portent, pour la première fois, les masques de Guy Fawkes, le héros légendaire du film V pour Vendetta. Pour eux le port de ce masque permet de masquer l’identité, mais constitue aussi un code commun symbolique qui permet le ralliement entre personnes venues du cyberespace » (pp. 81-82). Ils se révèlent au grand public avec des communiqués vidéo devenus célèbres et par des discours qui marquent : « Vous ne pouvez pas vous cacher ; nous sommes partout. Le savoir est libre. Nous sommes Anonymous. Nous sommes légion. Nous ne pardonnons pas. Nous n’oublions pas. Redoutez-nous » (pp. 78-79). En fait, comme le précisent Frédéric Bardeau et Nicolas Danet, Anonymous est représentatif de nouvelles formes d’organisation horizontales, fondées sur l’anonymat et la défense farouche de la liberté d’expression, où il n’y a par définition pas d’origine ethnique ou d’âge, ou encore de hiérarchies. La constance est celle déjà posée par les hackers : les ordinateurs peuvent changer le monde et le réseau peut niveler les rapports de force. C’est d’ailleurs l’ambition initiale de Wikileaks qui défend la liberté d’expression dans le but d’améliorer la situation politique mondiale, et qui part du constat que l’accès à l’information est loin d’être égal entre les États et leurs citoyens, qu’elle n’est pas diffusée correctement, que de nombreuses zones d’ombre subsistent, et surtout que les citoyens sont de moins en moins enclins à laisser agir sans aucun contrôle (pp. 96-108). Wikileaks aurait eu comme effet de pointer le fait que la presse n’est plus l’interlocuteur privilégié entre les sources et le public, en confrontant directement les États et les entreprises à leurs actes, en affichant leur réalité cachée. L’idée était de tenter de changer durablement les structures via un outil de diffusion d’un genre nouveau. La justesse de cette proposition sera à la hauteur de la violence suscitée en retour. Pourtant, les fuites semblent nécessaires à la démocratie parce qu’elles constituent la meilleure arme contre la corruption des élites. Et c’est bien ce qui dérange. Anonymous prend donc position pour la défense de cet outil de liberté attaqué de toute part dans la plus grande illégalité. C’est la première fois que Anonymous enverra un signal aussi fort en renversant la pression imposée par les puissants, et que le grand public prendra conscience du phénomène : une bataille entre les partisans du secret et ceux de la transparence. D’un côté, les gouvernements et les multinationales. De l’autre, des partisans et des ong pour plus de transparence et de liberté d’expression. Une situation nouvelle où, pendant longtemps, les citoyens n’ont pas eu le droit d’accéder à des informations récoltées par leurs dirigeants. Un ennemi nouveau pour les gouvernements qui ne sont pas préparés à ce type de confrontation. L’ennemi semble insaisissable, atomisé, les Anonymous ne se rejoignent que ponctuellement et ne tissent entre eux que des liens faibles, il est difficile de les cerner, et par définition ils sont anonymes (pp. 108-109). « L’anonymat est un élément clé de l’opposition […] l’anonymat offre la seule véritable possibilité de critique des institutions, qui sont devenues expertes en surveillance et verrouillent leur communication à destination du public » (p. 110). Anonymous est donc un « phénomène », car il ne s’agit pas d’une association ou d’une ONG, et ne s’appuie pas sur une structure légale. Il est donc difficile de parler d’une structure organisée encore moins de hiérarchie. Le principe d’anonymat aplatit inévitablement les différences. La liste des membres n’existe pas. Nul ne connaît le nombre total. Anonymous n’est pas un parti politique et se revendique non violent. Il est d’ailleurs impossible de certifier ce qui est Anonymous ou non. Anonymous n’est pas une société secrète comme les médias le suggèrent. Anonymous n’a pas plus d’objectifs précis, plutôt un certain nombre de principes qui recoupent ceux de la cyberculture : la défense de la liberté d’expression, le partage de la connaissance, la croyance en la faculté bénéfique du réseau, l’anonymat (pp. 112-115).

7Frédéric Bardeau et Nicolas Danet en déduisent que « les Anonymous sont surtout l’incarnation moderne de la cyberculture actuelle, dans toute sa complexité » (p. 115). Une sorte d’étiquette qu’il est possible de mobiliser ou derrière se ranger, une identité anonyme qui sert à expliquer qu’il s’agit de la voix de populations du monde entier, et non d’un groupe particulier : « Nous sommes Anonymous. Nous vous demandons de vous joindre à nous. Recherchez-nous et vous nous trouverez. Nous sommes parmi vous. Nous sommes vous. Tout le monde peut s’exprimer en tant que membre d’Anonymous. Nous n’avons pas de dirigeants. Uniquement des sensibilités. Nous n’avons pas d’objectifs. Uniquement des résultats. Nous ne pouvons pas être arrêtés, car nous ne sommes qu’une idée. Nous ne pouvons pas être effacés, car nous sommes transparents » (p. 117). Anonymous permet de transformer le collectif en une entité unique, quels que soient les idées ou les pays où ils se manifestent, toujours du côté des faibles pour réclamer la liberté. « Anonymous n’est pas un mouvement de hackers, mais plutôt la composante cyberculturelle des mouvements de contestation, dont le terrain d’action et les armes se situent dans le champ du web, et donc de l’information » (p. 144). Derrière Anonymous, ce sont de plus en plus de personnes qui se mobilisent, pour des raisons différentes et selon les situations, mais avec un fond commun : la défense des libertés sur le réseau et des revendications contemporaines et globales. Potentiellement, Anonymous regroupe tout un chacun parce que sa plateforme idéologique se résume aux libertés fondamentales. Sa force est de donner et revendiquer la parole, quelle que soit la situation (pp. 171-172).

8Finalement, Anonymous est symptomatique de la réalité mondiale à laquelle les populations sont confrontées, et bénéficie d’une audience grandissante auprès du public, une sorte de contre-pouvoir symbolique et actif, qui permet d’opérer une désobéissance civile passive. Le but est une remise en question des pouvoirs actuels, tournés vers le passé et de plus en plus oppressifs. Anonymous donne une voix à ceux qui n’en ont pas, dépasse de très loin la description d’un collectif de hacker, et semble en passe de devenir « une idée capable de changer le monde ». Anonymous, concluent Frédéric Bardeau et Nicolas Danet, est « en train d’instaurer un climat favorable à des changements de modèle de société, vers une plus grande horizontalité et un renouveau de la prise de parole publique » (p. 119).

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Pour citer cet article

Référence papier

Gilles Boenisch, « Frédéric Bardeau, Nicolas Danet, Anonymous : pirates informatiques ou altermondialistes numériques ? », Questions de communication, 21 | 2012, 357-360.

Référence électronique

Gilles Boenisch, « Frédéric Bardeau, Nicolas Danet, Anonymous : pirates informatiques ou altermondialistes numériques ? », Questions de communication [En ligne], 21 | 2012, mis en ligne le 18 décembre 2012, consulté le 23 juillet 2020. URL : http://journals.openedition.org/questionsdecommunication/6796

 

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Anonymous : Pirates informatiques ou altermondialistes numériques ? [Peuvent-ils changer le monde ?], Frédéric Bardeau, Nicolas Danet

mardi 9 octobre 2012, par Greg

La couverture m’avait d’abord fait penser qu’il y aurait un peu d’informatique et d’espionnage, peut-être une analyse sociologique de ces « Anonymous ». J’y ai découvert bien d’autres choses, avec plaisir et intérêt.

La première partie permet de comprendre comment se sont construites quarante ans d’histoire des hackers : implantés dans la contre culture et la désobéissance civile des années 70, avec une forte dimension politique :

« Nous recherchons la connaissance et vous nous appelez criminels (manifeste du hacker) »

« La technologie et son contrôle sont des affaires éminemment politiques qui engagent la liberté et le pouvoir, et non de simples points “techniques”. Les ordinateurs et internet permettent de comprendre et de partager la connaissance. Dès qu’un obstacle apparaît, il faut s’attacher à le faire sauter »

C’est cette importance accordée à la circulation de l’information qui fait que ce sont des hackers qui ont fondé Indymedia et Wikileaks.
Et aux déminage des obstacles : « Internet est progressivement en train de tomber sous le contrôle et les restrictions de gouvernements et de multinationales. Les connections internet sont filtrées et censurées, pas uniquement en Chine, mais aussi, de façon flagrante, en Occident, comme en Australie et au Canada. (Chas Computer Club 2011) ». D’où des recherches actuelles pour mettre en place “Commotion wireless”, un réseau sans fil, anonyme et crypté.
Loin de se limiter aux ordinateurs le mouvement des hackers est un rapport à la technique (aux téléphones, aux caméras de vidéosurveillance, aux puces RFID, etc.) Parmi les exemples cités : en 1993, les Yes Men parviennent à intervertir les enregistrements sonores des GI Joe et des Barbies : les GI Joe invitent à faire du shopping quand les Barbies tiennent des propos va-t-en-guerre ! De nombreuses actions font preuve de beaucoup d’humour.

Ce n’est qu’après cette passionnante entrée en matière que l’ouvrage détaille ce que font actuellement les Anonymous. C’est moins original et parfois trop détaillé. Les Anonymous sont vraiment apparus en 2008 en luttant publiquement contre l’Église de scientologie et les réseaux pédophiles. Leur soutien aux printemps arabes, aux Indignés, à “occupy wall-street” montre bien où va leur sympathie politique. Un de leur mode d’action est le déni de service (faire tomber un site web en panne) ou le défaçage (remplacer la page d’accueil par une autre page). Ça ne plaît pas à tout le monde et ils ont été poursuivi par Paypal, Mastercard, Amazon, etc.

Leur mode d’organisation – être anonyme – et leur principe « Personne ne parle pour Anonymous » et « Tout le monde peut s’exprimer en tant que membre d’Anonymous. Nous n’avons pas de dirigeant. Uniquement des sensibilités. Nous n’avons pas d’objectifs. Uniquement des résultats. Nous ne pouvons être arrêtés, car nous ne sommes qu’une idée. Nous ne pouvons pas être effacés car nous sommes transparents. ».

Autour d’eux une nébuleuses de groupes – parfois éphémères – qui adoptent certains de ces principes : lulzsec, télécomix, WITP.
Le livre détaille peu, et c’est dommage, leur mode de décision dans les forums, la doocratie. C’est un système ou c’est « celui qui dit qui fait ». Ce système se distingue d’un système démocratique où les décisions sont prises en commun avant qu’il y ait action. La doocratie implique au contraire une grande ouverture à la contribution dans lequel les individus choisissent des rôles et des tâches pour eux-mêmes et les exécutent par eux-mêmes. C’est un modèle particulièrement efficace qui facilite la prise d’initiative par le plus grand nombre. C’est par exemple ainsi que fonctionne Wikipedia.

Anonymous : Pirates informatiques ou altermondialistes numériques ? [Peuvent-ils
changer le monde ?], Frédéric Bardeau, Nicolas Danet, FYP Éditions (Présence), 2012, 208 p., 19,50 €.