Raymond Morel
1627 days ago
A l’adresse http:/
pourrez trouver une pièce de futurologie
archéologique très intéressante. Ce site donne
accès à une vidéo en flash de huit minutes,
censée provenir d’un « Museum of Media
History » en 2014 et racontant comment le
monde de l’information est devenu ce qu’il est
en 2014 : un monde où la presse classique
n’existe que sous la forme de ruines d’un passé
pas si ancien et où tout le monde participe à la
mise en ligne d’un système d’information planétaire
d’une ampleur quasi illimitée, dénommé EPIC.
Cette vidéo étant en anglais, en voici les
grandes lignes :
La vidéo part de la préhistoire : en 1989, un
chercheur du CERN (Conseil européen pour la
recherche nucléaire) pose les bases du World
Wide Web.
En 1994, apparaît Amazon sur un modèle
innovant : Amazon (qui n’est pas seulement une
librairie en ligne…), un magasin qui fait des
suggestions personnalisées automatisées, en s’appuyant
sur un système de recommandations.
En 1998, Google apparaît, sur une idée de base
que cette vidéo présente de manière très
intelligente : le système de Google (« Page-
Rank ») hiérarchise les sites Internet en
considérant les liens qui y renvoient comme des
recommandations.
De 1998 à 2004, d’autres innovations Internet
apparaissent : TiVo, Blogger, Friendster, Google-
News (le service d’information de Google édité
à 100 % par des automates…).
En 2004, la revue Reason envoie à ses abonnés
un numéro personnalisé, avec en couverture une
photo aérienne de leur maison… Google crée
Gmail, avec 1 Go de stockage et Microsoft se
réveille en créant Newsbot, un système de
filtrage personnalisé de l’information.
La guerre entre Google et Microsoft fait rage à
partir de 2005. Cette guerre passe essentiellement
par des acquisitions concurrentes.
En 2006, Google combine tous ses services
(Blogger, Gmail, GoogleNews, Google Desktop
Search…) en un seul, la Google Grid. Cette
plate-forme permet à chaque utilisateur de
stocker ou publier tout ce qu’il veut, sans
contrainte ni d’espace ni de bande passante. Le
système est accessible tout le temps et de
partout.
En 2007, Microsoft répond par MSN Newsbotser,
une plate-forme participative. Ainsi, tout
ce que vos collègues ou amis trouvent intéressant
est mis à votre disposition. Tout peut
être commenté. C’est aussi à cette époque que
du papier électronique mis au point par Sony
devient très peu coûteux.
En 2008, Google et Amazon fusionnent en
« Googlezon », qui permet à la Google Grid de
bénéficier des infrastructures commerciales et
de recommandations automatiques d’Amazon.
Cette alliance permet à Googlezon de distancer
Microsoft dans ces domaines. Ses systèmes sont
capables de personnaliser automatiquement
toutes les informations : un utilisateur, une
histoire, un texte personnalisé.
En 2011, le New York Times attaque Googlezon
sur des questions de propriété intellectuelle, car
ses « robots » partent d’articles de presse pour
engranger l’information. La Cour Suprême
donne raison à Googlezon.
Et le 9 mars 2014, Googlezon lance EPIC :
Evolving Personalized Information Construct,
un système global d’information dans lequel
chaque utilisateur participe, même passivement,
au résultat : l’information est sélectionnée, triée
et délivrée, chaque utilisateur étant rémunéré
par un pourcentage des ressources publicitaires
en fonction de la popularité de ses contributions.
Cela crée une « nouvelle génération de
journalistes free-lance ». Tout le flux d’information
est personnalisé et adapté au réseau
social de l’utilisateur.
Selon la vidéo, pour le meilleur, ce système est
un résumé du monde, pour le pire et pour la
majorité des gens, il se contente d’agréger des
informations triviales et étroites, car il est ce
que chacun en fait.
Ce document se finit sur une information
capitale : en signe de protestation contre cette
évolution, le New York Times se retire du
marché électronique et devient une publication
imprimée réservée à l’élite et aux plus âgés.
Utopie ou dystopie, à vous de voir. Toujours
est-il que ce document représente de manière
assez aisément appropriable un futur possible,
certes faisant peu de cas des éléments de
contexte. Confronté aux stratégies actuelles de
certaines firmes, en particulier de Google, il ne
paraît pas en tout cas incohérent. Reste aussi à
savoir si Microsoft et son trésor de guerre de 64
milliards de dollars US (au 30 septembre 2004 ;
selon certains analystes, ce montant augmente
d’environ un milliard par mois…) peuvent être
ainsi distancés…
Geoffrey Delcroix
(source : Futuribles Vigieinfo N° 10 janvier 2005)