Raymond Morel
1608 days ago
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Pour une politique de civilisation | |
Auteur | Edgar Morin |
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Éditeur | Arléa |
Date de parution | 2002 |
Nombre de pages | 79 |
ISBN | 9782869593220 |
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Pour une politique de civilisation est un essai issu d'un ouvrage éponyme d'entretiens entre Sami Naïr avec Edgar Morin, publié en 19971. Edgar Morin a extrait le texte écrit de sa main qui traite des déficiences et des carences de notre civilisation, qui ne sont pas qu'économiques et monétaires, et invite à mettre en place une politique de civilisation basée sur la régénération de la vie sociale, de la vie politique incluant l'écologie et de la vie individuelle2.
Il s'agit d'« une voie et non d'un programme politique, ni d'un projet de société »3. Il appelle à refuser la régression, à résister à la mort pour œuvrer vers la métamorphose de notre civilisation4.
L’auteur part du principe que « les développements de notre civilisation en menacent les fondements »5. Il constate que l’être humain pense que les externalités négatives produites par notre civilisation pourront progressivement se faire inclure dans la civilisation par autorégulation. Il critique une civilisation basée sur la quantité et non la qualité6 et « les chantres du progrès, pour qui la science, la technique, l'industrie, [le capitalisme et sa mondialisation de l'économie, l'exode rural et l'urbanisation] portaient dans leurs développements même la promesse de l'épanouissement humain »7. Selon lui « au sein de la civilisation occidentale, l’élévation du niveau de la vie est gangrénée par l’abaissement de la qualité de vie »8.
Au-delà des apports positifs, Edgar Morin analyse les conséquences négatives du progrès en général :
Il constate qu'« il y a crise dans la relation fondamentale entre l'individu et sa société, l'individu et sa famille, l'individu et lui-même »11. Le mal-être du bien-être se concrétise dans l'accroissement des maladies somatiques, psychiques et sociales-civilisationnelles13. Les maux de notre société se traduisent de manière concrète par l’augmentation de la consommation d’antidépresseurs et autres psychotropes ou bien encore par la crise des banlieues.
Les promesses révolutionnaires se sont effondrées (recul du communisme, des mouvements maoïstes, trotskistes, anarchistes, autres.)14.
La conjonction de l'égocentrisme, de la spécialisation, de la compartimentation professionnelle déterminent l'affaiblissement de la solidarité, du sens de la responsabilité et la dégradation du sens moral15..
Le progrès des connaissances s'accompagne d'une régression de la connaissance et de sous-développements intellectuel, affectif et moral.
L'épanouissement démocratique en Europe occidentale s'accompagne de régressions démocratiques16.
En conclusion de l'analyse , Edgar Morin signale que pour lui « ce qui est en cause est beaucoup lus que notre idée de modernité (postmodernité, transhumanisme, etc.), c'est à la fois notre idée de civilisation et notre idée de développement »17.
De même il considère le progrès technique comme pouvant être libérateur « à condition d’accompagner la mutation technique par une mutation sociale. »
« Une nouvelle résistance civile est née depuis la convergence de trois prises de conscience : la dégradation écologique, la crise de l’emploi et le dépérissement des campagnes »18.
La société civile crée des contre-tendances allant dans le sens contraire des maux de notre civilisation. Ainsi, une économie écologique s’est mise en place avec notamment le développement de l'économie sociale et solidaire, du commerce équitable, de l'agriculture raisonnée, de monnaie complémentaire etc. présentées chacune comme des alternatives à la mondialisation libérale et productiviste.
« Ce sont ces contre-tendances et ces résistances qu’il s’agirait de réunir en faisceau, de stimuler et d’intégrer dans une politique de civilisation »19. Face à « une situation à la fois pré-crisique et poly-crisique »20, ces initiatives dispersées et locales doivent être « non pas systématisées mais systémisées »19. « Il faut les relier pour qu’elles constituent un tout, où solidarité, convivialité, écologie, qualité de la vie, cessant d’être perçues séparément, seraient conçues ensemble »19.
« Ce projet de politique de civilisation, qui était le projet initial du socialisme, s’est donc trouvé soit trahi et inversé, soit effiloché. La politique de civilisation reprend l’aspiration à plus de communauté, de fraternité et de liberté, qui fut à la source du socialisme au siècle dernier, tout en y reconnaissant, cette fois, la difficulté anthropologique et sociologique »21.
Selon Edgar Morin cette politique de civilisation est inséparable de la science. Il n'y a pas chez Morin de méfiance à l'égard du projet scientifique, mais bien plutôt à l'égard :
Une politique de civilisation repose sur les impératifs suivants23 :
Edgar Morin installe ses impératifs de ressourcements républicains et laïques dans le contexte français (sans repli identitaire ni communautaire ni nationaliste), et dans les contextes européen, et planétaire28.
Edgar Morin décline ensuite les impératifs pour une politique de civilisation, territorialement et économiquement, jusque et y compris notamment en 29:
Edgar Morin ne parle pas de la régénération de l’homme en tant qu’individu mais de la régénération de l’espèce humaine. Argument qu'il faut rapprocher de sa proposition éditée dans la Méthode de placer l'être humain au centre d'une trilogie constitutive individu-espèce-société.
Il termine son ouvrage en montrant qu'une politique de civilisation n’est pas une aberration. Il explique de plus que le rôle de l’État doit être repensé, non plus comme celui qui joue le rôle directif, mais comme celui qui donne les moyens et les cadres.
Nicolas Sarkozy a repris l'idée à l'occasion des vœux de 2008 : « [.] une deuxième étape s'ouvre : celle d'une politique qui touche davantage encore à l'essentiel, à notre façon d'être dans la société et dans le monde, à notre culture, à notre identité, à nos valeurs, à notre rapport aux autres, c'est-à-dire au fond à tout ce qui fait une civilisation. Depuis trop longtemps la politique se réduit à la gestion, restant à l'écart des causes réelles de nos maux qui sont souvent plus profondes. [.] La politique de civilisation doit agir dans la longue durée »31.
Edgar Morin a réagi à plusieurs reprises32.
Les analyses d'Edgar Morin ont pour fil directeur la "pensée complexe", thème développé dans ses autres ouvrages, tandis que celles de Sami Naïr sont dominées par l'influence du dynamisme capitaliste et de la mondialisation du libéralisme. Mais elles aboutissent à des propositions communes, à une voie "qui ne peut s'ouvrir que dans la dialectique du local et du global, du national et du mondial" : la généralisation des protections sociales de l'État providence ; la régulation de la compétition économique mondiale ; la "politique de civilisation" régénérant et développant les vertus humanistes, solidaires, rationnelles et laïques ; le "civisme planétaire" ; l'enracinement de notre appartenance à un monde commun, à "une communauté de destin terrestre", sans pour autant vouer aux gémonies l'enracinement national. C'est donc à une véritable renaissance qu'appellent les auteurs, qui rétablirait l'être humain comme moyen, fin, objet et sujet de la politique. --Futuribles-- -- Futuribles
Mais où va le vaisseau Terre?
Le genre. Une ample réflexion, par un philosophe iconoclaste et un politologue spécialiste des problèmes du Tiers Monde, sur les conséquences de la mondialisation, l'évolution du travail, l'avenir technologique...
Le thème. Face au triomphe des marchés et de la "financiarisation" planétaire, quelles chances reste-t-il, non seulement aux modèles européens sociaux-démocrates, mais même au pouvoir des Etats-nations? Alors qu'on constate, presque partout, un creusement des inégalités et une régression démocratique, sur quoi refonder un "pacte social" élargi? Comment pourrait-on développer un civisme planétaire face aux périls écologiques?
La citation. "Il faudra que la mort devienne imminente [...] pour que le vaisseau spatial Terre prenne conscience de lui-même et opère les manoeuvres de salvation. Ainsi sommes-nous condamnés à vivre au bord du désastre." --Philippe Bauchard-- -- L'Expansion