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Localisation: flou autour des analyses effectuées par Swisscom

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TECHNOLOGIE

Les informations de localisation que transmet l’opérateur à l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) ne sont pas rendues publiques

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Le but de ce monitoring est de détecter les attroupements dans les lieux publics.  — © KEYSTONE/Laurent Gillieron

Il y a une semaine, Le Temps révélait que l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) avait demandé à Swisscom des informations sur les attroupements. L’opérateur communique aux autorités des analyses sur les lieux publics qui regroupent plus de 20 personnes simultanément dans une zone de 100 mètres sur 100 (soit 10 000 m2). Ainsi, la Confédération veut vérifier si l’article 7c, alinéa 1 de l’ordonnance 2 COVID-19 est respecté, soit l’interdiction des rassemblements de plus de cinq personnes dans l’espace public.

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Le système d’analyse est opérationnel, mais plusieurs questions demeurent. A commencer par celle de la transparence. Les informations que reçoit l’OFSP seront-elles ensuite rendues publiques? Non, répond Berne, de même que Swisscom, qui affirme que «ce n’est pas prévu». Et pourtant, rappelons-le, les données sont entièrement anonymisées et agrégées – il est impossible de savoir quel individu se trouvait à quel endroit. L’OFSP reçoit chaque jour à 8 heures ces informations de la part de l’opérateur: un seul employé de l’office y a accès et les données datent de vingt-quatre heures.

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Données de déplacement

Le fait que ni Swisscom ni l’OFSP ne transmettent ces informations est d’autant plus surprenant que, depuis le début de la crise, l’opérateur a déjà communiqué sur les changements d’habitudes de ses clients. Il a ainsi publié sur son site plusieurs graphiques montrant que les trajets ont sensiblement diminué depuis les mesures prises par le Conseil fédéral. On voit ainsi au niveau de la Suisse, mais aussi des cantons de Vaud, de Genève, de Zurich et du Tessin, que la moyenne des kilomètres parcourus chaque jour a chuté d’environ 45 à 20.

 

                                                                From LT-02.04.2020

La tentation d’une surveillance accrue à cause du virus

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TECHNOLOGIE

Pour lutter contre la pandémie, de nombreux Etats mettent en place des systèmes de traçage de la population, certains de force, d’autres de manière volontaire. Une partie de ces mesures pourrait perdurer après la crise, sans réel fondement, avertissent des défenseurs de la vie privée

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A Singapour, des centaines de milliers de citoyens ont accepté d'utiliser l'application Trace Together, qui permet d'alerter a posteriori ceux qui ont croisé une personne malade.  — © EPA/LYNN BO BO

L’inquiétude a changé de forme. Notre téléphone était hier encore perçu comme un mouchard pour Facebook et Google. Localisation, activités, interactions… Lovés au cœur de nos smartphones, les géants du numérique savent tout de nous. Mais depuis l’éclatement de la pandémie, cet espionnage a été relégué au second plan. Désormais, ce sont des Etats qui veulent pister nos appareils pour traquer le virus. Mais aussi des citoyens et des chercheurs qui nous incitent à utiliser ces données pour nous analyser et détecter les malades que nous fréquentons.

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Désormais, la crainte d’une surveillance généralisée se répand partout sur la planète. Et de nombreux citoyens sont inquiets: sous le couvert de la lutte contre le coronavirus, les autorités ne seront-elles pas tentées de mettre en place des systèmes de monitoring de la population qui survivront à la pandémie? Et l’on ne parle pas de dictatures… En France, les données des opérateurs de téléphonie mobile ont permis de déterminer avec précision l’exode des Parisiens vers la province. A l’échelle du continent, l’Union européenne veut utiliser les données des opérateurs pour mesurer les flux de population. Swisscom envoie chaque jour à 8h un rapport à la Confédération sur les attroupements dans les lieux publics. En Israël, le pistage est individuel, les autorités utilisant des méthodes de lutte antiterroriste pour suivre les porteurs de virus.

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Surveillance volontaire

Il y a aussi des moyens de surveillance plus insidieux, lorsque les autorités suggèrent fortement à leurs citoyens de télécharger des applications les alertant s’ils ont croisé des porteurs du virus. En Corée du Sud, la police sait dans quels bus ou cafés des malades sont passés, alertant ensuite les personnes qui ont fréquenté ces lieux. A Singapour, des centaines de milliers de citoyens ont accepté d’utiliser l’application Trace Together: elle permet, via Bluetooth, de savoir qui se trouve dans un rayon de quelques mètres, afin, là aussi, d’alerter a posteriori ceux qui ont croisé une personne malade.

Ces services ont beau fonctionner sur une base volontaire, il faut s’en méfier, avertit Sylvain Métille, avocat et professeur en protection des données et droit pénal informatique à l’Université de Lausanne: «Même si le but est noble, il faut être prudent concernant le but réel de ces applications et la qualité de leur développement. Même avec un produit parfait et utilisé sur une base volontaire, il y a un risque que les personnes soient forcées de l’utiliser, par exemple si un employeur ou un magasin vous oblige à installer l’application, voire si la pression sociale de vos collègues ne vous laisse pas le choix.»

Lire aussi: Swisscom aidera la Confédération à détecter les attroupements via les téléphones

Dire stop à tout moment

Raphael Rollier, qui développe des innovations avec les géodonnées chez Swisstopo, fait une analogie avec les services des géants de la tech. Pour lui, «une application qui demande l’accès à vos données GPS est la seule solution qui permette d’obtenir une traçabilité des contacts. Par contre, je ne pense pas qu’il faille la rendre obligatoire. C’est un outil de prévention qui doit être proposé sur une base volontaire et l’utilisateur doit pouvoir l’arrêter à tout moment. De la même manière qu’on décide de donner notre géolocalisation à Google en échange d’un service de navigation, l’utilisateur décide de fournir ces données de localisation pour faciliter la traçabilité des contacts entre malades et personnes en bonne santé.» Raphael Rollier ajoute que «pour obtenir une adhésion suffisante, la clé est d’avoir un acteur de confiance et transparent qui propose ce service».

Les risques de dérive sont très nombreux. Ces applications vont-elles inciter des malades à ne pas déclarer leur état de santé? Ceux-ci vont-ils laisser leur smartphone chez eux lorsqu’ils sortent? Et que se passera-t-il si les données individuelles – exactes ou fausses – sont rendues publiques par erreur?

Alerte aux Etats-Unis

Cela fait beaucoup, beaucoup d’écueils à éviter pour que la vie privée et les libertés individuelles soient préservées. Aujourd’hui, effrayée par une pandémie qui fait des ravages, une majorité de citoyens semble accepter ces mesures de surveillance. Mais on est à un moment clé, comme l’écrivait récemment l’historien et humaniste israélien Yuval Noah Harari dans le Financial Times: «La bataille autour du virus pourrait être l’argument décisif dans la bataille autour des données personnelles, car lorsqu’il faut choisir entre droit à la vie privée et santé, les gens privilégient généralement la santé.»

Notre analyse: Zoom, Google Meet, Classroom, Microsoft Teams, Youtube: la crise du coronavirus aggrave notre dépendance aux géants de la tech

Aux Etats-Unis, de nombreux organismes sont déjà en alerte contre les mesures de surveillance que pourrait prendre le gouvernement. Car il y a eu des précédents. «Au lendemain du 11-Septembre, les Etats-Unis ont promulgué le Patriot Act, qui confère au gouvernement de vastes pouvoirs d’urgence. Mais cette loi, qui devait expirer en 2005, a été sans cesse renouvelée. Nous n’avons absolument aucune raison de croire que les agences gouvernementales souhaitant étendre leurs pouvoirs en réponse au virus seront prêtes à voir ces pouvoirs s’éteindre une fois le virus éradiqué», estime Albert Fox Cahn, directeur de l’ONG new-yorkaise Surveillance Technology Oversight Project.

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Le spécialiste rappelle que la localisation fournie par les téléphones permet de déterminer si l’on participe à une manifestation politique ou à un événement religieux. «Je suis aussi inquiet de l’utilisation de l’intelligence artificielle (IA) pour donner des scores de risque en lien avec le virus. Nous ne savons pas si ces outils fonctionnent bien et s’ils souffrent des mêmes biais que d’autres systèmes d’IA pour la surveillance, comme la reconnaissance faciale», conclut Albert Fox Cahn.


L’EPFL à l’origine d’une application d’alerte

Sur le même modèle que des applications utilisées notamment en Corée du Sud et à Singapour, l’EPFL développe un programme permettant à un individu de signaler lorsqu’il présente les premiers symptômes de maladie. Ensuite, toutes les personnes ayant été précédemment en contact avec lui seront alertées par cette même application. Mercredi, l’EPFL a communiqué à ce sujet en affirmant qu’elle participe à un consortium regroupant 130 partenaires de huit pays.

La principale caractéristique de cette plateforme, intitulée Pan-European Privacy-Preserving Proximity Tracing (PEPP-PT), est de garantir l’anonymat de tous les participants. Ce service doit répondre aux normes européennes de protection des données et pourrait être utilisé lors de voyages à l’étranger. A terme, il s’agira de développer un protocole anonymisé de suivi et d’alerte, basé sur la technologie de communication sans fil Bluetooth. Selon ses promoteurs, la technologie en développement pourrait s’avérer utile pour accompagner la sortie de confinement. A priori, la plateforme sera finalisée à la fin de la semaine prochaine.

En parallèle, de très nombreuses initiatives fleurissent en Suisse pour le partage des données sur sa propre santé. Ainsi, le site Covid-self-report.ch, développé par un ingénieur de l’EPFL et deux ingénieurs de la HEIG-VD d’Yverdon, propose un questionnaire sur son état de santé. Cette semaine, l’Université de Genève s’associait à la plateforme Grippenet.ch en y intégrant des questions spécifiques sur la pandémie actuelle. Signalons aussi le site Covidtracker.ch, développé au sein de l’EPFZ, qui vise à prédire les nouveaux foyers de maladie. Le canton de Berne s’est associé à cette dernière initiative.

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Plusieurs problèmes

Le problème, c’est qu’il n’y a pour l’heure pas de collaboration entre ces plateformes, ce qui empêche d’avoir une vision d’ensemble. Et l’on imagine que ce sont surtout les jeunes et les gens à l’aise avec les nouvelles technologies qui les utiliseront, ce qui peut biaiser les résultats. A. S.

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